Sergueï Fokine (Université nationale Économique de Saint-Pétersbourg) Spectres du Capital dans l’œuvre et la vie d’un écrivain-prolétaire [20 octobre 2021]

 Description

Colloque "Spectres de Dostoïevski", Université de Strasbourg, 20-22 octobre 2021, organisé par Nicolas Aude, Victoire Feuillebois et Karen Haddad

Résumé de l'intervention :

On va partir dans la communication proposée d’un aveu de Dostoïevski fait dans la lettre fameuse écrite de Rome le 18 octobre 1863 à N. N. Strakhov où, à bout de ressources, il a déclaré : « Que Boborykine sache, comme on le sait déjà dans Le Contemporain et Les Annales de la Partie, que je n’aie jamais vendu, sans compter des Pauvres gens, un seul de mes livres sans avoir été payé d’avance. Je suis l’écrivain-prolétaire et si quelqu’un veut mon travail il doit par avance me fournir le paiement. Un tel ordre est maudit par moi-même. Mais c’est comme ça et il parait qu’autrement ne puisse pas l’être » 1. Il faudrait tout de suite préciser que la formule autobiographique l’écrivain-prolétaire présente la logique du capital à l’œuvre dans la vie et et les romans d’une manière renversée : le capitaliste, s’il suit effectivement la logique du capital, risque tout le temps de se retrouver aux bas-fonds, sans argent, sans un sou, selon une autre formule de Dostoïevski, tirée de la même lettre. Autrement dit, l’esprit du capital est déterminé non seulement par la volonté de l’enrichissement qui se veut infinie, mais aussi par la pulsion de la dépense, de la destruction de la richesse, y compris la personne même de l’écrivain. Tout en présentant, d’une part, la force du libido (l’économie libidinale, selon J.-F. Lyotard), de l’autre, la pulsion de la mort, le capital, en tant que l’esprit mais aussi le spectre, hante la vie de Dostoïevski, comme celle de plusieurs de ses personnages, à commencer par Macaire Diévouchkine, qui élabore et incarne toute une philosophie de la misère, qui sous-entend la vie de l’écrivain- prolétaire, et à terminer par le diable des Frères Karamazov, qui rêve de «s’incarner...dans quelque marchande obèse» dont l’image n’est pas sans

Достоевский Ф. М. Полное собрание сочинений: В 30 т. / редкол.: В. Г. Базанов (отв. ред.) и др.; ИРЛИ. Т. 28, кн. 2. Письма, 1860-1868 / текст подгот. и примеч. сост. А. И. Батюто и др. Л.: Наука. Ленингр. отд-ние, 1985. С. 50.

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rappeler le dernier homme du capitalisme triomphant de la fin de l’histoire, qui n’a rien à faire de son capital, qui est « le spectre de la vie, qui a perdu la notion des choses et oublie jusqu’à son nom »2.

Le spectre du capital, tout en étant innommable, hante donc la vie et l’œuvre de Dostoïevski et cherche à se présenter dans toute une galerie des figures qui forment une sorte du tout, partagé entre la vie et l’œuvre et reliant celle-ci à celle- là par la religion du capitalisme (W. Benjamin). Explorer le cortège infernal de ces figures, telle est l’ambition de cette communication.

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